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Lobbynews : Le manque de transparence au Palais fédéral et l'initiative No Lobbying

29.04.2025 06:50 – Reto Naegeli

Le conseiller national Lorenz Hess et la Swiss Blockchain Federation sont critiqués pour leur manque de transparence dans la publication des mandats politiques – les deux cas montrent les faiblesses du système actuel.

Lorenz Hess et l'obligation de signlaer les intérêts

Le conseiller national Lorenz Hess offre un bon exemple de représentation d’intérêts opaque. Tout en étant l’un des politiciens les plus influents dans le domaine de la santé, le centriste bernois est aussi consultant en relations publiques et conseiller d’entreprise. Depuis plus d’un an, Lorenz Hess siège au conseil d’administration de la société Swiss Medical Network Holding SA. Il n’a pas déclaré ce mandat. Confronté par Lobbywatch, Hess déclare : « J’ai constaté pendant la session de mars que ce n'est pas la seule adaptation qui n'est pas sauvegardée ou qui l'est de manière incorrecte à l'expiration du délai. » Il dit également avoir convenu avec le service informatique de corriger les erreurs pendant la session spéciale.

Hess est l’un des membres du Parlement avec le plus de mandats accessoires. Selon les recherches de Lobbywatch, il cumule une douzaine de mandats dans le secteur de la santé. Fait particulièrement frappant : auprès des services du Parlement, Hess n’a déclaré qu’un seul mandat auprès du groupe Visana. La base de données de Lobbywatch révèle toutefois qu'il détient huit mandats d'administrateur dans différentes entreprises du groupe Visana (Stiftung Visana Plus, Galenos AG, sana24 AG, Visana Beteiligungen AG, vivacare AG, Visana Allgemeine Versicherungen AG, Visana Versicherungen AG, Stiftung Atusana).

Depuis des années, Hess argumente auprès de Lobbywatch que ces mandats doivent être considérés comme un seul, car toutes les sociétés citées appartiennent à la Stiftung Visana Plus. Ces filiales partagent le même conseil d’administration et la même direction. Sa rémunération – 166 750 francs en 2023 – doit donc être comprise comme une compensation pour son mandat de président du conseil du groupe Visana dans son ensemble; les autres mandats ne sont pas rémunérés en plus.

Chez Lobbywatch, nous nous en tenons à l’article 11 de la loi sur le Parlement. Celui-ci oblige chaque membre des Conseils à déclarer chaque année les « fonctions qu’il occupe au sein d’organes de direction, de surveillance, de conseil ou autres dans des sociétés, établissements ou fondations suisses ou étrangers, de droit privé ou de droit public. » De plus, il est peu transparent de ne mentionner que la Visana Holding comme mandat, car on ne peut pas supposer que tous les citoyens savent que Galenos AG, vivacare AG et sana24 AG sont des filiales de celle-ci. Lobbywatch précise toujours, lors de l’indication de la rémunération, que le montant s’applique à tous les mandats auprès des sociétés du groupe Visana.

Cet exemple illustre les faiblesses du système actuel : une obligation de déclaration sans contrôle ni sanctions ne suffit pas à garantir la transparence des liens d’intérêts des parlementaires. Cela montre à quel point il est facile de dissimuler des intérêts économiques – avec des conséquences potentielles sur les décisions politiques.

Lobbying opaque en faveur de la blockchain

Il existe également un manque de transparence au sein de la Swiss Blockchain Federation (SBF). L’association s’engage pour « l’écosystème de la blockchain » et compte parmi ses membres des noms connus comme Novartis, Julius Bär ou encore le canton de Zurich. Fin mars, la SBF s’est réorganisée et a créé un nouveau conseil consultatif (« Groupe Politique »). Ce nouveau comité compte neuf membres du Conseil national et du Conseil des États : Matthias Michel et Petra Gössi (PLR), Isabelle Chappuis et Erich Ettlin (le Centre), Benjamin Fischer, Franz Grüter et Paolo Pamini (SVP), Baptiste Hurni (PS) et Tiana Moser (Vert’libéraux). Le bureau de l’association est dirigé par l’agence de lobbying furrerhugi, dont le fondateur Lorenz Furrer officie aussi comme vice-président de la SBF.

Après que Lobbywatch a révélé les liens de ces politicien·ne·s avec l’association, toutes les informations sur le conseil consultatif et ses membres ont disparu du site de la SBF le 8 avril. L’association indique, sur demande, que les noms ont été retirés «pour éviter des malentendus». De quels malentendus pourrait-il s’agir? Cela n’est pas précisé. La SBF affirme que le Groupe Politique est l’un de ses huit groupes de travail thématiques et qu’il « s’occupe des conditions-cadres politiques et favorise l’échange thématique avec des experts issus de la technologie, de la science, de l’économie et de la politique ». L’obligation de transparence est ici claire : de tels mandats doivent être déclarés. C’est un fait aussi que la loi oblige les politicien·ne·s à publier chaque début d’année leurs liens d’intérêts actuels avec des groupes de lobbying. Dans ce cas, ils ont donc agi conformément aux prescriptions légales et n’ont enfreint aucune règle. Néanmoins, la suppression soudaine de l’information soulève des questions sur la transparence de l’association, d’autant plus qu’elle s’engage activement dans l’influence politique en faveur du secteur de la blockchain.