05.07.2024 07:35 – Balz Oertli
Le Groupe d'États contre la Corruption (GRECO) a évalué la transparence du financement de la politique en Suisse. La Confédération y souligne les progrès réalisés - en oubliant de mentionner qu'il reste encore beaucoup à faire.
Le Département fédéral de justice et police (DFJP) a récemment annoncé dans un communiqué de presse que la Suisse avait progressé dans la lutte contre la corruption. Le Groupe d'États contre la Corruption (GRECO) du Conseil de l'Europe a évalué positivement les développements en Suisse.
Le GRECO est un organe du Conseil de l'Europe composé de 50 États membres qui œuvre pour le respect des normes anti-corruption. En 2011, le GRECO a évalué les réglementations relatives à la transparence politique en Suisse : insuffisantes, selon la conclusion de l'époque.
Des rappels à l'ordre réguliers
Dans des mises à jour régulières, le GRECO examine maintenant si la Suisse se conforme aux recommandations de l'époque. Il y a un an, le GRECO a par exemple critiqué l'absence de publication des rémunérations des parlementaires - Lobbywatch en a fait état - et a déclaré que les parlementaires n'étaient toujours pas tenus d'indiquer combien ils gagnaient avec des activités annexes. Cette demande n'a pas été satisfaite : Lors de la dernière session, le Conseil des États a rejeté une proposition de l'ancienne conseillère aux États Mazzone.
Mais maintenant, la Suisse a progressé, résume le DFJP dans le dernier rapport du GRECO. "Les nouvelles règles pour une plus grande transparence dans le financement de la politique y contribuent de manière importante", selon le communiqué de presse. De nombreux médias ont annoncé la nouvelle.
Un seuil trop élevé
Pourtant, un examen plus approfondi du rapport du GRECO montre une autre image. Il s'agit de la transparence du financement politique. Selon le GRECO, la Suisse a fait "certains progrès", "mais des améliorations sont encore nécessaires sur certains points".
Par exemple, le seuil à partir duquel les dons doivent être divulgués. En Suisse, les dons ne doivent être publiés qu'à partir de 15 000 francs suisses. C'est trop élevé et il faudrait réfléchir à un abaissement de ce seuil, selon le GRECO.
L'attrait des associations de donateurs
Plus fondamentalement, la transparence du financement des partis et des campagnes par des tiers est insuffisante. Il est par exemple toujours possible de faire transiter les dons par une fondation et de donner ainsi des sommes importantes de manière anonyme. Un tel don important de la famille Hug - qui avait d'abord été anonymisé via la Fondation du Grütli - aux opposants à la loi sur l'électricité a fait la une des journaux il y a quelques semaines.
Le don de la famille Hug n'est pas un cas isolé. En collaboration avec le collectif de recherche WAV, opendata.ch et investigativ.ch, Lobbywatch gère depuis l'automne dernier la plateforme de transparence "l'argent + la politique“, sur laquelle sont publiées les informations financières de la politique suisse. Un coup d'œil sur les données montre qu'un total de 66 dons provenant de telles associations de donateurs ont été publiés jusqu'à présent. Comme le montre le tableau ci-dessous, ce sont principalement les partis de la droite qui utilisent cette tactique de dissimulation.
Acteur | Montant | Nombre de dons d'associations de bienfaiteurs |
---|---|---|
SVP | 1'991'060.00 | 26 |
FDP | 1'425'930.00 | 26 |
Die Mitte | 444'989.80 | 10 |
Alliance Vaudoise | 128'540.00 | 1 |
Komitee Renteninitiative Ja | 60'000.00 | 2 |
Allianz gegen das Stromgesetz | 50'000.00 | 1 |
Total | 4'100'519.80 | 66 |
Une mise en œuvre toujours partielle
Le rapport du GRECO critique également d'autres points : En Suisse, les acteurs politiques ne sont tenus de déclarer que leurs revenus et non leurs dépenses. Et il n'y a pas de contrôle généralisé de la comptabilité des partis et des associations.
Le GRECO juge toutefois positive la mise en œuvre des règles de financement de la politique. En particulier, les contrôles aléatoires du CDF ainsi que les menaces de sanctions sont à considérer comme positifs. Le présent "Deuxième addendum à son deuxième rapport de conformité“ clôt l'évaluation du GRECO sur le financement des politiques publiques. Sur les six recommandations initiales relatives à la transparence du financement de la vie politique en Suisse, l'organe du Conseil de l'Europe considère que deux d'entre elles ont été entièrement mises en œuvre, deux partiellement et deux n'ont pas été appliquées. Les autorités suisses sont donc invitées à "informer le GRECO des développements futurs concernant la mise en œuvre complète des recommandations